Par Mathieu Flaig
Nous sommes à une époque où les entreprises vivent sous l’injonction de se transformer numériquement. Tout ce qui a été fait jusqu’ici, tout ce qu’elles sont et qui a permis leur succès, est leur dit-on, dépassé. Pourtant, si transformation digitale il y a, cette dernière a commencé il y a de nombreuses années, avec l’arrivée d’internet, des médias sociaux, des intranets… Le constat d’obsolescence martelé par les “spécialistes” est à relativiser, surtout si leur argumentation est centrée sur l’innovation technologique. Certes, la transformation digitale est une réalité, mais les enjeux sont avant tout humains et non technologiques…
Le web n’est pas près de s’arrêter, et il va constamment se complexifier. Il est impossible de penser se transformer une bonne fois pour toutes, et d’arriver à un point où l’entreprise, son organisation, son offre… sera à l’abri de cette transition numérique.
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Nous parlerons donc plutôt d’accélération digitale, et la nécessité de mener une course de fond en même temps qu’une course de vitesse, pour tenir sur la durée, faire les bons choix et prendre un temps d’avance. En bref, comment faire quand l’accélération s’accélère ? Voici quelques conseils pour tenter d’y arriver.
Dans un monde numérique chaotique, comment l’entreprise peut-elle garder le bon cap ? En développant tout d’abord une vision afin de définir une direction à garder en toutes circonstances.
Beaucoup d’entreprises et de grands groupes échouent ou piétinent dans leur démarche de transformation digitale parce qu’ils n’arrivent pas embarquer les collaborateurs et qu’ils utilisent les mauvais leviers. Ils ne se projettent pas dans une vision viable, un rêve en commun, mais restent sur des solutions ou moyens techniques. La tendance est d’avoir une focale exacerbée sur le « quoi » ou le « comment » mais trop rarement sur le « pourquoi », ce qui entraîne des réticences et du scepticisme. C’est pourtant le rôle des dirigeants d’expliquer pourquoi il est nécessaire de digitaliser l’entreprise.
=> Les managers exécutifs doivent formaliser la vision, le rêve en grand de l’entreprise. C’est à eux d’incarner le leadership et de définir les grandes orientations stratégiques de l’entreprise, c’est à eux seuls qu’incombe cette tâche.
Il est très facile de former la direction ou les collaborateurs au numérique, notamment avec des modules de formation génériques pour apprendre à utiliser Twitter, LinkedIn, Adwords, Yammer… mais très souvent, cet apprentissage est déconnecté des spécificités de l’entreprise.
Cela s’explique notamment par le fait que les objectifs assignés à une formation n’ont pas été clairement réfléchis (on se forme au digital parce que ça a été décidé par la direction), et que l’intégration de l’apprentissage n’est que rarement adaptée à la réalité opérationnelle qui est souvent propre à un secteur, à une culture, à des produits ou des services. On met par exemple souvent en avant les exemples d’Uber ou de AirBnB, mais sont-ils pertinents pour une compagnie d’assurance ou un industriel de l’alimentaire ?
=> Soyez attentif à former moins longtemps (évitez les séminaires intensifs de 3 jours), plus souvent (tous les trimestres), avec des cas concrets issus de l’entreprise (des frictions constatées dans le parcours d’achat, de nouveaux concurrents, des lourdeurs opérationnelles…).
Sans que vous le sachiez, des pépites numériques peuvent se cacher dans votre entreprise. Ici un salarié qui a développé une passion et une expertise sur les médias sociaux, là un chef de projet qui passe ses week-ends à faire du montage pour partager des vidéos… Ces talents doivent être identifiés, valorisés, et incités à prendre en main des projets numériques, voire à former leurs collègues qui apprécieront d’autant plus l’apport d’une personne connaissant parfaitement l’interne. D’autres ont simplement envie de se lancer. Rassemblez ces bonnes énergies et fédérez-les !
=> L’accélération digitale se fait de l’intérieur, et vos collaborateurs actuels en sont les moteurs.
L’un des défis du manager dans un monde digital est aussi de faire les bons choix : devez-vous mettre des QR codes sur tous vos supports de communication ? Votre département SAV a-t-il besoin d’un chatbot ? Devez-vous installer des beacons dans tous vos points de vente ? Devez-vous lancer une mini-série sur Snapchat ? Il en va de même pour l’interne : les vestes doivent-elles être remplacées par des t-shirts, le baby-foot est-il un indispensable au milieu d’une salle de réunion ?
Ce qui fait qu’une entreprise est “digitale”, ce ne sont pas des apparats, des locaux modernes et des technologies à la mode (même si ça améliore toujours le quotidien). Être ou faire du digital, c’est avant tout un état d’esprit, une démarche de curiosité, une logique de tests et d’apprentissages qui n’enferment pas dans le passé, mais préparent l’avenir.
=> La transformation doit se faire en profondeur, pas avec des initiatives cosmétiques ou qui ne s’inscrivent pas dans une logique de création de valeur (améliorer l’expérience client, optimiser l’efficacité opérationnelle, fluidifier la circulation de l’information et des données…).
Non, l’innovation n’est pas la chasse gardée d’un laboratoire qu’on laisse expérimenter dans son coin. Non, la donnée n’est pas un enjeu uniquement pour le Marketing et/ou la Relation client. Non, l’exploration ne résume pas à organiser une learning expedition dans la Silicon Valley pour visiter les locaux de Google ou Facebook.
Nombreux sont les sujets autour desquels il faut mobiliser toute l’entreprise. Ces derniers vont constituer le ciment d’un édifice solide qui la protégera contre les tremblements de terre disruptifs, les tsunamis de l’expérience client… Ces sujets ne sont pas liés à un département interne, à un outil ou à une technologique en particulier, ils concernent tous les collaborateurs et impactent leur quotidien (ex : les données, l’innovation, la collaboration, la formation…).
=> Identifiez au plus vite les sujets transverses qui vous bloquent ou vous limitent dans votre accélération digitale et faites-en la pédagogie auprès de l’ensemble de vos collaborateurs pour les impliquer dans votre démarche.
Je conclurais ces 5 conseils par une citation de Jean d’Ormesson : “En cent ans, nous avons connu plus de changements qu’en 10.000 ans. Quelle accélération ! Tout va si vite : le présent n’est qu’un morceau d’avenir qui se mue aussitôt en passé”.